Symposium sur la réforme fiscale – Faisons ce qui doit être fait, réformer !

Une réforme fiscale nécessite un débat serein et ouvert avec toutes les parties prenantes - dans cette perspective, le symposium sur la réforme fiscale organisé à l’initiative du ministre des Finances est le bienvenu -, car nous vivons des temps incertains. Nous sommes confrontés à un climat géopolitique instable et à des hausses de prix historiquement élevées qui freinent le développement de notre prospérité économique et sociale. Pour traverser cette tempête, il faut éliminer autant que possible l’incertitude qui accompagne cette crise.


Jean Baeten, CENTRE DE COMPÉTENCE FISCALITÉ & INVESTISSEMENTS Koen De Munck, CENTRE DE COMPÉTENCE FISCALITÉ & INVESTISSEMENTS
05 juillet 2022

Notre système fiscal n’est pas prêt pour le 21e siècle

Le monde des entreprises prend les mesures nécessaires pour lever l’incertitude des ménages en procédant aux indexations salariales. Malheureusement, cet effet est en partie annihilé par l’inertie du système fiscal. Car ces moments historiques mettent une fois de plus en évidence les problèmes bien connus : notre système fiscal ne soutient pas notre politique salariale. La dernière étude ‘Taxing Wages’ de l’OCDE le confirme année après année : La Belgique connaît la pression fiscale sur le travail la plus forte d’Europe. Chaque augmentation des salaires (résultant de l’indexation) est donc brutalement effacée par la forte progressivité, qui résulte de l’étroitesse de nos barèmes fiscaux et de la hauteur de nos taux d’imposition. Notre système fiscal est complètement déconnecté de l’évolution de nos salaires et constitue donc de plus en plus un obstacle à la compétitivité de nos entreprises et à la réalisation du taux d’emploi tant convoité de 80%.

Cette progressivité excessive de l’impôt des personnes physiques constitue un problème structurel pour les bas, moyens et hauts salaires. Depuis 20 ans, le bonus à l’emploi a considérablement augmenté le salaire net - et donc la volonté de travailler - de ce premier groupe. Mais dans les faits, on continue ainsi à nier la réalité : il est impossible de rémunérer un surcroît de travail, d’implication ou de connaissances acquises, car le supplément de salaire est taxé à près de 50% pour presque tout le monde. À titre d’illustration, un travailleur dont le salaire brut est de 2.450 EUR - et qui a donc droit au bonus à l’emploi - se voit déjà appliquer le taux de 48% (45% plus les centimes additionnels) comme taux le plus élevé.

« Il est impossible de rémunérer un surcroît de travail, d’implication ou de connaissances acquises, car le supplément de salaire est taxé à près de 50% pour presque tout le monde »

Notre système fiscal doit enfin s’ancrer dans le 21e siècle, parce que notre politique de rémunération évolue rapidement, en partie en réponse à la « guerre des talents » en cours. Il reste donc indispensable de maintenir et de renforcer des instruments de rémunération RH flexibles pour un public de plus en plus diversifié. Nous constatons également que les besoins de la société à court terme ont beaucoup changé. La demande de soutien à la transition verte et numérique n’a jamais été aussi forte. Une fiscalité plus verte peut effectivement jouer un rôle à cet égard, mais uniquement en soutenant le climat d’investissement, et non en pénalisant le contribuable. 

Conditions de base pour une bonne réforme

Le monde des entreprises soutient l’intention de la réforme de réduire la pression fiscale pour tous les travailleurs, mais il voit également se profiler à l’horizon des défis qui doivent être pris en compte lors de l’élaboration de la réforme fiscale. 

Nos recommandations :

1     Élargir les barèmes fiscaux et abaisser les taux : l’étroitesse de nos tranches d’imposition et notre structure de taux fait de la progressivité excessive un problème pour tous les travailleurs. La priorité est donc de normaliser la progressivité de l’impôt des personnes physiques en l’alignant sur celle des pays voisins (en guise d’illustration, voir le graphique ci-dessous, ligne pointillée rouge) ; 

2     Ne pas augmenter, mais simplifier les prélèvements fiscaux : un tax shift implique un déplacement de la charge fiscale ailleurs. Mais dans ces endroits, la majeure partie de la marge a déjà été utilisée : la Belgique est déjà l’un des premiers pays européens en termes de pression fiscale totale, qui repose aujourd’hui déjà plus que la moyenne sur l’imposition des bénéfices et des revenus (pensez, par exemple, au précompte mobilier qui a triplé en 30 ans). Il ne faut donc pas taxer plus, mais taxer mieux en élaguant, en dialogue avec les entités fédérées, la multitude des impôts directs et indirects sur les revenus du capital et du patrimoine, tels que les droits d’enregistrement et l’impôt sur les revenus immobiliers. 

3     Activer l’épargne, le capital à risque et l’entrepreneuriat : la prise de risque ne doit pas être pénalisée, au contraire ! La transition verte et numérique demande des choix politiques clairs qui soutiennent les investissements nécessaires, par exemple dans les infrastructures et les technologies. En outre, le vieillissement de la population contraint les gens à être de plus en plus capables de subvenir eux-mêmes à leurs besoins futurs. En ce qui concerne la fiscalité des investissements, il faut respecter les choix d’investissement (neutralité fiscale) et ne tenir compte que des rendements réels (moins-values et ajustement à l’inflation). 

4     Veiller à ce que les effets des signaux de prix ne soient pas annulés par l’index : si l’on choisit d’utiliser les signaux de prix pour dissuader la consommation ayant des effets négatifs sur l’environnement, il faut les neutraliser dans l’indice des prix et veiller à ce que ce ne soit pas l’employeur qui paie la facture. 

5     Ne pas réformer au détriment de la compétitivité de nos entreprises : il serait inacceptable que les mesures en faveur du pouvoir d’achat soient compensées budgétairement par la suppression des mesures qui atténuent les coûts salariaux élevés (notamment les réductions du précompte professionnel) et qui stimulent la recherche et le développement et l’innovation de demain. Aujourd’hui, ce soutien est non seulement extrêmement fructueux, mais il constitue un pilier essentiel pour garantir notre future prospérité économique et sociale. 

La FEB a fait son travail et est plus que prête à collaborer sur un système fiscal simple et compétitif qui récompense le travail et répond aux transitions et aux défis sociétaux à venir. 

Voir également :

>‘Comparaison géographique et temporelle de la pression fiscale sur le travail en Belgique 

>‘Analyse d’impact : Mesures de lutte contre le piège promotionnel 

>‘Réforme fiscale globale

Photo ©belga

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