« Mission not accomplished » - L’ONEM évalue l’impact de 10 ans de dégressivité accrue des allocations de chômage

Le 1er novembre 2022, la dégressivité renforcée des allocations chômage a fêté ses 10 ans. C’était l’une des réformes phares du gouvernement Di Rupo en 2012. Elle poursuivait un double objectif : activer les chômeurs et réaliser des économies. Il s’agissait de la plus grande réforme de l’assurance chômage depuis l’introduction de la première dégressivité dans les années 1980. Il est donc grand temps d’examiner si elle a été à la hauteur de ses objectifs. C’est ce que vise l’ONEM avec une étude qu’il a publiée le 27 octobre.


Monica De Jonghe, ADMINISTRATEUR-DIRECTEUR GÉNÉRAL ET EXECUTIVE MANAGER DU CENTRE DE COMPÉTENCE EMPLOI & SÉCURITÉ SOCIALE Stephan Neetens , CENTRE DE COMPÉTENCE EMPLOI & SÉCURITÉ SOCIALE
14 décembre 2022

L’évaluation de l’ONEM suit de près une étude d’impact réalisée par l’OCDE à la demande du SPF ETCS en juin de cette année. L’OCDE a examiné si le renforcement de la dégressivité a conduit à davantage de transitions du chômage vers le travail dans la période qui a précédé et suivi son introduction. Sa réponse est négative. Selon elle, l’explication réside principalement dans la complexité du système (le plus complexe au monde, selon l’OCDE).

L’analyse de l’ONEM vise à aller au-delà de l’étude de l’OCDE. Il souhaite tout d’abord fournir une vue d’ensemble en cartographiant l’impact sur les transitions du chômage au travail sur une période plus longue (2010-2020). Il souhaite ensuite évaluer l’impact budgétaire de la réforme sur les dépenses sociales en matière de chômage. Enfin, il vise à fournir un point de départ pour estimer l’impact de la réforme sur le risque de pauvreté.

L’ONEM fait des constats préoccupants. Comme l’OCDE dans son cadre temporel plus court, l’ONEM ne trouve pas non plus de preuve d’un impact positif sur les transitions du chômage vers l’emploi sur la période 2010-2010. Les accès au travail ont globalement évolué positivement au cours de cette période, mais cette évolution semble surtout être fortement corrélée à la situation économique, à l’état du marché du travail et aux schémas saisonniers traditionnels.

Les économies réalisées dans les dépenses de chômage sont également très maigres. Pour la période 2010-2020, elles s’élèvent à 148 millions EUR, soit 0,5 % des dépenses sociales totales pour le groupe de chômeurs étudié. Le potentiel d’économie de la dégressivité renforcée est particulièrement réduit par l’augmentation des indemnités pendant les trois premiers mois de chômage (65 %). Ce fait illustre également la fragilité financière du système en période d’incertitude économique (le potentiel d’économie n’existe qu’en période de croissance économique lente et régulière). Il est toutefois intéressant de noter que l’ONEM constate que si la dégressivité n’avait pas été gelée de mars 2020 à octobre 2021 à cause du coronavirus, les économies réalisées auraient été de 0,8 % des dépenses.

L’ONEM constate en outre que l’allocation du chômeur moyen est systématiquement inférieure au seuil de pauvreté. Cependant, ce n’est pas un fait nouveau. L’ONEM reconnaît que le renforcement de la dégressivité n’a qu’un impact marginal à cet égard.

La principale conclusion est indubitablement que l’ONEM admet que la complexité du système limite l’impact d’une dégressivité renforcée sur le comportement de recherche des chômeurs. Très éclairant, en outre, par rapport à l’étude de l’OCDE, c’est qu’il souligne la discordance entre le calendrier dégressif théorique et réel. En effet, une grande partie des chômeurs (42,8 % en 2019) n’est pas soumise à la dégressivité (par exemple, les bénéficiaires de l’allocation minimale, les plus de 55 ans…). Ce groupe a également augmenté de manière significative ces dernières années en raison des indexations régulières et des adaptations des allocations au bien-être qui ont réduit substantiellement la marge de dégressivité disponible (augmentation substantielle de la prestation minimale).

FEB - L’étude de l’ONEM signifie-t-elle pour autant, comme l’a affirmé Marc Leemans la semaine dernière dans De Standaard, que la dégressivité ne fonctionne pas et qu’il vaut mieux l’abandonner? Certainement pas. Au mieux, cette étude montre que cette version de la dégressivité «à la belge» ne fonctionne pas. Elle donne également des indications claires pour une réforme structurelle. Un système de dégressivité ne peut avoir un effet positif sur le comportement de recherche d’emploi et sur l’accès au travail que s’il est simple et donc compris par les chômeurs. Le nombre des étapes de la réduction des allocations doit être limité et la réduction doit être substantielle. Il y a largement de quoi alimenter le travail d’un gouvernement qui voudrait réformer.

Photo ©belga

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